EDITO JANVIER 2023 : « Et si on essayait la bienveillance ? »
Nous venons
de célébrer – fêter Noël, et nous nous apprêtons à passer dans une nouvelle
année. On ne peut pas dire que l’année qui se termine ait été vraiment
folichonne : guerre, menace grave sur le climat, effondrement de la
biodiversité, crise énergétique et économique, pauvreté croissante, déchirures sociales
et politiques, corruption à de très larges niveaux... Bref, c’est un peu (beaucoup)
le désenchantement ! Et il n’y a pas grand-chose pour nous redonner
confiance dans la capacité de l’humanité à rebondir et à créer enfin un monde
où les loups seraient transformés en agneaux…
Nos
communautés chrétiennes n’échappent pas à ce marasme : un pessimisme silencieux
s’insinue jusque dans nos sacristies, qui se révèle quelquefois au gré d’une
conversation. On a l’impression d’une fin d’une ère, celle de la chrétienté.
Nos églises, même si elles étaient un peu mieux remplies à Noël que d’habitude,
n’ont pas fait le plein. Où étaient les gens ?
Pour réagir face
à cette lente et progressive dissolution, nos évêques, le pape en tête, nous
proposent un remède : la « synodalité ». Un autre mode de
fonctionnement qui serait plus attractif et plus fécond pour revitaliser cette
vieille aïeule qu’est l’Eglise et qui doit agir à tous les niveaux depuis la
base jusqu’au sommet, un peu comme un vaccin. Nous en avons déjà parlé plusieurs
fois dans ces rubriques. Ce mode de fonctionnement renouvelé implique la
participation du plus grand nombre dans la vie communautaire dans un esprit de
communion fraternelle et une réelle ouverture sur le monde (la mission). C’est
un défi.
La mise en
place de ces changements est compliquée et délicate, d’autant plus que nos
communautés sont vieillissantes (c’est un euphémisme !), les bénévoles peu
nombreux et les structures assez rigides. On reste attaché à beaucoup de
formalisme. Chacun a son pré carré. Et le moindre changement provoque des
tiraillements, des critiques, des tensions voire des conflits… J’en ai hélas
encore été témoin ces derniers jours, malgré que c’était Noël. Comment ouvrir
nos communautés pour y ramener de la vie, si l’on reste constamment sur la
défensive et dans une attitude de méfiance envers ceux qui ne sont pas de nos
petits cercles (clans ?) et n’en connaissent pas les codes, et si l’on
rejette toute nouveauté ? Pour moi c’est une souffrance que je vis en tant
que pasteur.
Je pense sincèrement que la démarche synodale n’a pas beaucoup de chance d’aboutir, si on ne vit pas une réelle conversion personnelle et communautaire. Est-il déjà trop tard ? La lenteur des progrès et le manque de volonté commune dans la lutte contre le réchauffement climatique est hélas exemplative de la difficulté de l’humain à se remettre en question et à saisir les opportunités pour sortir de son petit confort. Je voudrais vous partager cette réflexion et cette présentation de la démarche synodale par un dominicain, le P. Benoît-Dominique de la Soujeole qu’il développe dans un petit livre de 90 pages : « Synode ? vous avez dit synode ? ». Les enjeux de ce grand mouvement (remue-ménage et remue-méninges !) lancé par le pape François y sont bien détaillés, avec les risques, les pièges à éviter mais aussi les fruits attendus. Le livre publié aux éditions Artège peut être commandé à la librairie diocésaine Siloé à Liège (11 €), ou être acheté en format numérique e-book par exemple sur Google Play Livres (7 €).
Notre évêque, dans son récent message (lettre pastorale) d’Avent, nous invitait à « élargir l’espace de notre tente » (expression tirée d’Isaïe 54,2 qui s’adressait au peuple de Dieu s’apprêtant à rentrer de l’exil).
Personnellement, je rejoins bien cette proposition de l’évêque qui s’insère pleinement dans la démarche synodale ; l’équipe pastorale s’y était d’ailleurs déjà engagée avant même la publication de la lettre et en avait fait son objectif pour la mise en œuvre dans notre unité pastorale. Tous nos groupes, mouvements et équipes seront invitées à se l’approprier pour rendre concret ce renouvellement.
J’y ajouterais cependant un complément (ingrédient) que j’estime indispensable : la Bienveillance. Si la pression est trop forte dans la tente et que chacun se cramponne à ses a priori, ses jugements et ses prérogatives, les cordages vont lâcher, la toile se déchirer, et on va se retrouver exposés aux intempéries… La Bienveillance envers toutes et tous est une attitude existentielle à cultiver, et à demander dans la prière puisqu’elle est un don, un fruit de l’Esprit (Ga 5,23).
Une définition ? « Bienveillant
est celui ou celle qui dans ses relations concrètes avec tout frère et toute sœur
en humanité, incline à voir ce qu’il y a de bon en cette personne et cherche à
agir en toute circonstance pour son bien. » Plus qu’un sentiment, la
bienveillance est une inclination de la volonté qui vient d’un cœur bon, une
attitude morale qui nous engage envers l’autre. La Bienveillance, alliée à la
Bonté, au Respect et à la Confiance, a le pouvoir de changer le monde en nous
transformant nous-mêmes.
Et si nous essayions ??
Chers frères et sœurs, je vous souhaite à chacun.e d’entre vous une heureuse année 2023 empreinte de Bienveillance ! Que le Seigneur vous bénisse et tous vos proches, et nous accorde sa Paix.
Bernard Pönsgen, curé