La fête d’aujourd’hui nous
incite à regarder nos familles d’un autre œil que d’un œil purement
humain :
Les exemples d’Abraham, de
Syméon et Anne, de Joseph et Marie nous montrent que par-delà les liens du
sang, il y a le lien de la Foi.
Ce lien, pour tous les auteurs
inspirés de la Bible, est essentiel. Jésus lui-même s’attache à le rappeler
souvent à ses disciples : « Qui est ma mère ? Et qui sont mes
frères ? Celui qui fait la volonté de Dieu est ma mère, mon frère, ma
sœur. » (Mc 3,33-35)
…On souhaiterait évidemment que
nos familles, toutes nos familles, deviennent des lieux où les liens tissés par
le partage d'une même foi soient perçus comme des liens vitaux. Mais nous le
savons bien, c’est loin d’être évident !
Ce
ne l’a jamais été d’ailleurs :
Il faut oublier l’image idéalisée de la famille chrétienne que l’Eglise a voulu
imposer comme modèle à des générations de fidèles, alors que cela correspondait
plus à un état de fait sociologique qu’à autre chose : Sauf exception,
la foi partagée en famille était plus de l’ordre de l’accomplissement d’un
certain nombre de pratiques plus ou moins extérieures, dans un cadre où aller à
la messe, dire ses prières, être obéissant à ses parents et aux représentants
de l’Eglise, allait de soi. Cela n’impliquait pas pour autant le partage en
profondeur d’une foi vivante et d’une conversion constante au message évangélique.
On était plutôt dans la reproduction d’un modèle religieux que dans un vrai
partage spirituel en famille.
Pire,
la famille pouvait et peut toujours d’ailleurs être le lieu de la
confrontation parfois dure et violente entre les membres sur base de leurs
choix religieux ou spirituels qui ne s’accordent pas. Jésus avait
prévenu : « Pensez-vous que je sois venu
mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la
division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront
divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront :
le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la
fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille
contre la belle-mère. » (Lc 12,51-53)
Pour
éviter cette confrontation, beaucoup de familles font l’impasse sur les
questions qui touchent à la Foi : on n’en parle pas, tout simplement.
C’est bien plus commode et on évite ainsi de perturber par des discussions
houleuses les fêtes familiales (Noël, Pâques…). Les grands-parents le savent, et
souvent évitent soigneusement le sujet. Il faut aussi ajouter qu’il y a chez la
plupart, surtout chez les jeunes parents, une bonne dose d’indifférence et
parfois de rejet – rejet qui a pour origine justement le caractère
‘obligatoire’ des modèles religieux de jadis.
Tout ceci parce que, du temps
de Jésus comme du nôtre, la Foi, frères et sœurs, relève d’un CHOIX
PERSONNEL. On ne peut pas enfermer quelqu’un dans un moule religieux ni
violenter sa conscience.
Qu’on veuille témoigner et
partager ses convictions intimes et son expérience de croyant, c’est très
bien ! Le Christ le demande d’ailleurs lorsqu’il envoie ses disciples
évangéliser le monde entier. Mais le respect de la conscience personnelle est
absolument indispensable -cela n’a malheureusement pas toujours été le cas dans
l’histoire, et quand on pense qu’il a fallu attendre le Concile Vatican II pour
que l’Eglise reconnaisse officiellement la liberté de conscience… !
Bon, alors aujourd’hui on a Laura,
une jeune de chez nous qui demande le baptême. Elle demande le baptême parce
qu’elle croit et qu’elle veut croire en Dieu, en la vie qu’Il donne, et
personne ne l’a influencée. C’est son CHOIX.
Laura, en demandant le baptême
chrétien, tu ne renies pas ta famille, tu ne la quittes pas, mais tu
intègres une autre famille plus large, celle des amis de Dieu et des disciples
de Jésus Christ. Cette famille t’accueille aujourd’hui. Une famille qui n’est
pas construite sur les liens du sang, mais sur le lien de la Foi.
Tu verras que cette famille a
plein de visages différents, elle est de tous les continents et de toutes les
couleurs, les cultures, les langues… et comme toutes les familles humaines,
elle a des qualités et des défauts car elle est composée d’hommes et de femmes
comme toi et moi. Pas des anges !
Mais ce qui la rend différente des
autres familles, c’est qu’elle a Jésus au centre.
Comme la famille de Nazareth :
Marie, Joseph, et Jésus au centre. Et un même Père, celui qui est aux cieux.
Du coup, on est tous des frères
et des sœurs. Des frères parfois un peu râleurs, des sœurs parfois un peu olé
olé, mais des sœurs et des frères qui s’aiment, qui cherchent à s’aimer
vraiment !
Oui, Laura, c’est cette
famille-là que tu intègres aujourd’hui. Tu y auras ta place. Elle a aussi un
autre nom : la Communauté. Je suis fier et heureux de t’y accueillir,
et je pense que nous le sommes tous, n’est-ce pas ? Dites-le,
montrez-le en applaudissant notre candidate !
Laura, comme Abraham jadis, tu as entendu dans ton cœur l’appel
du Seigneur. Au début, peut-être simple curiosité, envie d’en savoir plus,
envie d’être de quelque part, de te donner des racines. Des racines et des
ailes ! Et puis, le Seigneur t’a séduite, saisie au cœur… Tu vas le
suivre, maintenant tu sais déjà ce que cela signifie, être chrétien, être
disciple… C’est le plus beau chemin qui soit, même s’il n’est pas
toujours facile, c’est un chemin qui nous révèle notre beauté propre, notre
humanité véritable telle que Dieu la voit et la veut : créé à son image,
capable de croire, d’aimer, d’espérer !
Tes motivations, tu les as
certainement partagées avec tes accompagnateurs Suzanne et René. Ils
sont émerveillés eux aussi du chemin que tu suis, que tu as déjà parcouru. Ils
ont découvert aussi quelle belle, bonne personne tu es. Un peu timide au début,
puis tu t’es engagée résolument dans la démarche, chose qui n’est pas facile
car tu es toujours aux études, et tu travailles en même temps pour subvenir à
tes besoins. Tu es soutenue aussi par ton copain Ruben, un chic garçon.
Le premier dimanche du carême
2024, tu recevras l’appel décisif de notre évêque, à la cathédrale de Liège. Tu
te prépareras aussi par une retraite avec tous les autres catéchumènes, qui eux
aussi ont des profils différents et des parcours de vie très variés…
Tu recevras alors enfin le
baptême au cours de la Vigile Pascale, ici dans la Communauté rassemblée pour fêter
la Pâque, la Résurrection du Christ.
Tu seras entourée de tes
parrain-marraine.s , tes accompagnateurs, ta famille et de tous les sœurs et
frères de la Communauté du Sacré-Cœur.
J’invite tous ceux qui le
peuvent à y participer pour manifester à Laura qu’elle est importante
pour la Communauté de l’Eglise, que nous sommes fiers d’elle et que nous
voulons continuer à la soutenir !
En effet, comme le disait Martine
Lewis, membre du Vicariat Annoncer l’Evangile à la sortie de la cathédrale lors
des baptêmes d’adultes à la vigile de l’an dernier : « Nous
pouvons témoigner que le baptême de quelques-uns fait la joie de tous, et que l’Eglise
entière est impactée par l’intégration de nouveaux membres en son sein. »
Elle ajoutait : « Puissent nos communautés saisir la chance d’accueillir
un catéchumène, de cheminer ensemble avec lui et de vivre ces rites baptismaux
sans abandonner ce nouveau chrétien – cette nouvelle chrétienne au sortir de la
Vigile pascale… »
C’est là que je me sens
interpellé, frères et sœurs. On a eu Odette ; on a eu Yannick ; on a
eu Mélyssa… Qu’avons-nous fait pour garder le contact après la célébration ?
Je sais que ce n’est pas facile, et on a tendance à penser que c’est à eux d’aller
vers nous. On a bien tenté quelques contacts, mais nos communautés se
dispersent si facilement… chacun a sa vie, comme on dit. C’est dommage. Je rêve
qu’on organise des retrouvailles ; c’est évidemment malin de ma part de
dire cela au moment où je quitte l’UP… !
Frères et sœurs, l’exemple de Laura
nous stimule ! Alors que nous voyons aujourd’hui l’avenir de l’Eglise s’assombrir…
que nos églises, si elles ne se vident de leurs paroissiens, elles s’écroulent
quelquefois par manque de moyens… que peut-être nous avons nous-mêmes du mal à
continuer à croire dans ce qui nous avait été inculqué dans notre jeunesse mais
que nous n’avons pas cherché à entretenir, à mettre à jour… ET BIEN, aujourd’hui,
GRÂCE à LA FOI, comme Abraham, comme Sara, comme le vieillard Syméon et la
prophétesse Anne, comme Marie et Joseph, une jeune fille de 23 ans s’est
mise en route – c’est ce fameux déplacement intérieur qu’on appelle la foi –
et elle nous dit, tous les catéchumènes nous disent (enfin, c’est comme
cela que je l’entend) : « Mais enfin, vous avez un trésor, vous
les chrétiens ! Et vous ne le savez pas ! Ce n’est pas terminé...
rien n’est terminé. Commencez donc, ou recommencez à vivre de l’Evangile !
»
Comme dit encore une personne
très engagée dans l’évangélisation dans le diocèse d’Angers en France : « Je
voudrais inviter ceux qui connaissent un petit découragement dans leur mission
à passer un moment au catéchuménat pour retrouver la joie de l’évangélisation
et voir l’Esprit Saint à l’œuvre. J’ai d’ailleurs une pensée pleine de
gratitude pour ces catéchumènes et néophytes : ils font de nous des
témoins du mystère, des témoins de Dieu qui se fait proche de tout homme, de
toute femme. »
Laura, avec toi une page neuve
commence pour notre Communauté. Je t’en remercie et je bénis le Seigneur !
Je lui demande de te bénir : qu’il t’assiste de son Esprit de joie et de
force pour parcourir le beau chemin qui est le tien !
Viens, approche-toi.
(Bénédiction avec imposition
des mains, remise de la Bible)