Recevoir la Parole dans le silence
Nous voici en Carême ! Et d’emblée nous est adressée cette parole qui est en même temps une interpellation : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » (Mt 4,4)
Comment est-ce que je reçois la Parole de
Dieu ? Comme une nourriture dont j’ai faim, une
nourriture indispensable ? Si c’était le cas, il me faudrait la mâcher
longuement, consciencieusement, pour qu’elle exprime toute sa vitalité, sa
force de transformation, et qu’en l’assimilant, en me laissant habiter par
elle, je puisse réellement grandir dans la Foi, dans l’Espérance et dans l’Amour…
Reconnaissons que bien peu souvent, nous prenons le
temps de la méditer ; presque aussitôt qu’elle a frappé nos oreilles au
cours de la liturgie dominicale, nous l’avons déjà oubliée ! Notre esprit
est pris par autre chose, par ces milliards de sollicitations et ces pensées
parasites qui recouvrent et escamotent le Message divin.
Le mois passé, j’avais consacré mon éditorial à cette question : « Pourquoi est-ce si difficile de comprendre la Bible ? » ; et j’avais suggéré que peut-être, nous n’en prenions pas assez les moyens pour nous aider dans ce travail. L’Evangile de ce premier dimanche de Carême nous indique sans détour la condition ESSENTIELLE pour accueillir et comprendre la Parole : Jésus est conduit par l’Esprit au désert. C’est là qu’il veut faire le point sur sa relation avec son Père et se préparer à faire ce que le Père lui demande.
Donc, il va au désert
pour méditer la Parole dans un entretien d’amour et de confiance filiale avec
Dieu son Père. Et là, comme nous, il devra affronter les pensées parasites (les
tentations) qui essayent de détourner la Parole pour se servir d’elles à son
seul avantage ; en effet, le Tentateur se sert lui aussi des textes de
l’Ecriture en les manipulant (ce que nous faisons quelquefois à notre insu).
Mais dans ce combat, Jésus qui est enraciné dans l’obéissance amoureuse au Père
et à sa Parole divine, aidé par l’Esprit, redonne à cette Parole son véritable
sens : « C’est le Seigneur ton Dieu seul que tu adoreras ! »
(Mt 4,10).
La Parole de Dieu est TOUJOURS à recevoir dans un
dialogue d’amour avec le Seigneur. Sinon, les pensées parasites (les
tentations) nous détourneront toujours de cette attitude d’humilité et
d’accueil indispensable, empêchant cette Parole d’entrer dans notre cœur profond
et d’y faire son œuvre. Donc, AVANT de recevoir la Parole, il est indispensable
de se mettre en prière. Et, en la recevant, je demande à l’Esprit Saint
d’enlever tout obstacle en moi pour qu’elle puisse me travailler
« jusqu’aux moëlles de mes os » (cf He 4,12).
Le mot de cette 1ère semaine du Carême est
« DESERT ». N’est-ce pas une invitation à faire silence,
extérieurement et intérieurement, en supprimant autant que possible toute
source de bruit parasite ? Nous sommes tellement assaillis ! Alors,
si nous éteignons la radio, les gsm…, si nous nous retirons dans un endroit
calme, dans ce moment choisi de silence et de solitude (habitée !) il
nous est loisible de nous mettre en présence de la Parole, celle que nous
adresse le Seigneur dans la liturgie (la feuille dominicale, le ‘Prions en
Eglise’…) ou en ouvrant la Bible pour une lecture amoureuse personnelle. Ne
nous contentons pas de l’entendre une simple fois à la messe. Reprenons-là,
mâchons-la, et surtout prions-la ! Soyons certains qu’ainsi, elle ne
manquera pas de porter son fruit… « Ainsi en est-il de ma
Parole qui sort de ma bouche : Elle ne me revient pas à moi sans
effet, sans avoir fait ce que je désire, sans avoir réalisé ce pour quoi je
l’ai envoyée. » (Isaïe 55,11)
« Seigneur, avec toi, nous irons au
désert, poussés comme toi par l’Esprit. Et nous mangerons la Parole de Dieu, Et
nous choisirons notre Dieu, Et nous fêterons notre Pâque au désert : Nous
vivrons le désert, avec toi ! » (G
229, Jean Servel – Joseph Gelineau)
Bon Carême ! Curé Bernard Pönsgen