Pourquoi donc est-ce si dur de lire la Bible ???
« La
Bible, on n’y comprend rien ! » – « Tous ces vieux textes qu’on
lit à la messe ne sont plus adaptés à notre culture ; est-ce qu’on ne
pourrait pas les remplacer par des textes plus modernes ? »
Ces réflexions, je les entends régulièrement de la part de certains pratiquants. Sans doute rejoignent-elles le sentiment d’un plus grand nombre qui préfère le garder pour soi, ou qui a déjà pris tout doucement du recul par rapport à la messe dominicale. Qu’est-ce que ça peut nous apporter, en effet, si nous nous sentons totalement étranger à ce langage qui serait apparemment en total décalage aujourd’hui ?
J’ai donc décidé de prendre le taureau par les
cornes et d’essayer de répondre à cette question qui me semble de la plus haute
importance : Pourquoi donc est-ce si dur de lire la Bible, et
qu’est-ce qui pourrait nous y aider ? Avant de choisir la solution
de la « dilution » ou de « l’évacuation » - solution de
facilité, ne conviendrait-il pas de se demander honnêtement quels sont les
véritables obstacles à la compréhension et donc à la connaissance du message
biblique, et qu’est-ce qui pourrait être mis en place personnellement ou
communautairement pour y remédier ?
Ce sera l’objet d’une réflexion plus approfondie que je vous proposerai dans une série d’articles à paraître sur le blog de l’unité pastorale.
Si je puis me permettre, chers sœurs et frères, je
vous convie aussi à reprendre votre vieille Bible, vous savez, celle qui est
occupée à prendre la poussière sur l’étagère, et à lire chaque jour un petit
peu, pas trop, en vous arrêtant régulièrement pour méditer, en soulignant ce
que vous ne comprenez pas et en consultant les notes de bas de page. Notez
aussi dans un cahier vos découvertes, les pensées qui vous viennent en
reprenant ces mots et ces phrases dans votre prière. Vous verrez, cela vous
emmènera plus loin que ce à quoi vous vous attendriez ! Des horizons
insoupçonnés…
D’autre part, si vous êtes intéressé(e), et pourquoi
pas, venez nous rejoindre lors de nos rencontres de partage d’évangile qui ont
lieu deux fois par mois, soit le deuxième mardi du mois de 17 à 18h à la
chapelle de l’église St Laurent d’Andrimont, ou soit le quatrième vendredi du
mois de 14 à 15h à la chapelle de l’église St Fiacre de Dison. Vous y serez
chaleureusement accueilli(e) - sans obligation de régularité. Et rassurez-vous,
on ne s’y prend pas la tête ; pas besoin être savant pour
participer : juste avoir envie d’échanger ou d’écouter… (renseignements
complémentaires chez Jean Luc Alexandre, Bernard Boudron ou moi-même).
Alors ? On se lance ?
« Heureux ceux qui écoutent la Parole et qui la
gardent dans leur coeur… » (Luc 11,28)
Premier chapitre (introduction) : « Un vide sidéral… »
Nous sommes en principe tous d’accord sur ce point :
Si la Bible fait effectivement partie intégrale de notre héritage spirituel,
fondement de la foi catholique, il serait logique que tout croyant la connaisse
au moins pour l’essentiel – comme par comparaison tout citoyen belge est sensé
connaître la loi (mais bien sûr personne n’a lu ni ne connaît l’entièreté des
codes de loi : nous maîtrisons ce qui est essentiel pour notre vie de tous
les jours, comme par exemple le code de la route ou les parties du code civil
qui règlent les relations de voisinage, la propriété…).
Or, quand on interroge les chrétiens de base - même
pratiquants, il apparaît que cette connaissance de la Bible et de son univers
est plus que parcellaire. On a bien encore de temps en temps une Bible chez soi
à la maison qui prend la poussière sur une étagère, mais qui prend encore le
temps de lire la Bible régulièrement et de la méditer ? Le phénomène
est encore plus important chez les jeunes : Beaucoup n’ont jamais ou si
peu entendu parler d’Abraham, de Moïse, des prophètes et même de Jésus et des
Evangiles. On est devant un vide sidéral ! Evidemment, la part qui est
faite à la culture biblique dans l’enseignement – même dans les établissements
catholiques – est devenue peau de chagrin ces dernières décennies. En
comparaison, les cours de religion que j’avais reçus par mon professeur (qui
était alors un prêtre, l’abbé Winbomont) m’avaient bien inculqué l’Histoire
Sainte et ouvert les portes de la connaissance de la Foi chrétienne qui est
incarnée dans un peuple, le peuple de Dieu. Je lui en reste infiniment
reconnaissant !
Car la caractéristique fondamentale du christianisme
est justement sa dimension historique, incarnée : c’est l’histoire d’une
relation entre Dieu et des hommes et des femmes bien concrets, et dans cette
relation apparaît de façon circonstancielle et progressive le visage d’un Dieu
d’amour qui veut entrer en alliance avec nous. L’Ancien Testament éclaire cette
progression qui est constitutive du cheminement de foi de tout croyant et
qui culmine dans la Révélation du Nouveau Testament. Tous les livres et les écrits
de la Bible sont donc utiles et précieux pour que chacun puisse relire son
histoire personnelle et la rattacher à celle des hommes et des femmes qui ont
été marqués par la rencontre avec « le Dieu de nos pères ».
Le concile Vatican II avait estimé dans sa
constitution sur la liturgie que, dans la structure de la messe, la liturgie de
la Parole devait comprendre une lecture de l’Ancien Testament, une autre du
Nouveau (Actes ou Epîtres), et bien sûr un Evangile : Cela dit
l’importance de la Bible pour nourrir la foi des fidèles. D’autre part,
l’homélie du célébrant est destinée à aider ceux-ci à comprendre les textes et
à les confronter avec leur vie personnelle. Cependant, il faut bien avouer que
pour un certain nombre, ces textes qui leur paraissent déconnectés de la vie
d’aujourd’hui, écrits dans un langage obscur - parfois même choquants, passent
largement au-dessus de leur tête malgré tous les efforts des célébrants dans
leurs homélies ; d’où les remarques entendues plus haut.
Que faire ? Faut-il alléger le menu en
supprimant des textes ou en les remplaçant par des textes profanes, comme une
soupe que l’on diluerait avec de l’eau ? – St Paul affirmait lui-même déjà
dans la 1ère aux Corinthiens (3,2) à propos de son
enseignement : « Je vous ai donné du lait et non de la nourriture
solide car vous ne pouviez pas la supporter », mais il ajoute dans le même
verset : « et vous ne le pouvez pas même maintenant, car vous êtes
encore charnels » ! Nous serions donc « trop
charnels » ? – C’est-à-dire trop tournés vers les choses de la terre,
les choses matérielles, et pas assez vers les choses spirituelles… C’est bien
probable ! Surtout à notre époque.
Avant de choisir la solution de la
« dilution » ou « l’évacuation » - solution de la facilité,
ne conviendrait-il pas de se demander honnêtement quels sont les véritables
obstacles à la compréhension et donc à la connaissance du message biblique, et
qu’est-ce qui pourrait être mis en place personnellement ou communautairement
pour y remédier ?
Pour moi, en effet, l’enjeu est de taille : il
s’agit ni plus ni moins de sauver notre mémoire chrétienne et donc notre avenir
en tant que peuple de Dieu qui tisse continuellement une histoire vivante pour
que chacun puisse y inscrire son nom et accueillir le salut offert par Lui.
Votre curé Bernard Pönsgen